Cerys bondit, mais vit avec effroi ses griffes glisser sur le cuir de l'animal. Emportée par son élan, le petite lionne s'étala au sol dans un roulé-boulé spectaculaire. Alors qu'elle se remettait sur ses pattes, prête à en découdre de nouveau, elle vit Theluji et Ienzo la dépasser, et un regard en arrière lui apprit que Thulrur n'est pas bien loin. Cerys sentit alors une vague de soulagement l'envahir : tous sembles indemnes.

N'attendant pas plus longtemps, elle rattrapa ses compagnons et se jetta à nouveau dans la mêlée. Choisissant une fois de plus d'attaquer le flanc de la bête, Cerys s’élança et percuta de plein fouet son adversaire. Les griffes et les crocs en avant, elle cherchait une prise. Elle espérait que le poids de trois lions, combiné à la fatigue du sanglier, permettrait aux Uamuzis d'amener leur proie à terre.

Les autres se battaient férocement, aussi férocement que le sanglier lui-même, et Thulrur les rejoignit finalement. Les adolescents s'attaquaient aux flancs et Ienzo tentait semble-t-il de lui briser les pattes arrière; alors, le montagneux décida de retourner s'intéresser à la plaie béante qu'Ienzo avait si bien creusée sur la nuque de l'animal. Elle dégoulinait de sang et, si Thulrur n'espérait pas réussir à lui briser les cervicales, il comptait bien aggraver la blessure au possible. Et tant pis si le sanglier n'en souffrait que davantage. Il supposait que, immergé par l'adrénaline, il ne devait même pas sentir la douleur.

Du moins l'espérait-il. Thulrur détestait ce combat – car ce n'était pas une partie de chasse, mais un réel combat opposant des forces presque similaires. Il était évident que les lions allaient gagner; ils étaient en groupe et, au pire, auraient le sanglier à l'usure. Mais Thulrur avait du respect pour leur adversaire: en duel, il n'était pas sûr qu'il aurait eu l'avantage.

Si seulement ça avait été moins fouillis... Si seulement ils avaient combattu plus noblement.
Mais qu'y pouvaient-ils ? A ce stade de leur survie, les Uamuzi n'étaient que des survivants affamés et n'ayant plus vu de grosse proie depuis des mois. Des barbares, se jetant comme des fous sur la première nourriture venue. Des sauvages luttant dans le sang et le chaos.

Il se serait dégoûté lui-même s'il n'était pas déjà trop occupé à déchirer la plaie ouverte par son allié de toujours, baignant ses babines de sang dans un masque rouge qui faisait disparaître le crème de son museau. Mais nul doute qu'il y réfléchirait plus tard...

Ienzo effectue un net succès.
Le sanglier donne des coups, mais rien n'y fait: assailli de toutes parts, il n'arrive pas à se dégager de l'emprise du lion des cavernes. Celui-ci trouve ce qu'il cherche: la peau tendre, les tendons, les cuisses charnues.

Cerys effectue un succès.
Le poids de la jeune lionne - ainsi que l'assaut d'Ienzo sur ses pattes - fait chuter le sanglier qui s'écroule lourdement. Mais il se débat encore, prêt à asséner des coups qui, il l'espère, emporteront au moins l'un de ses assaillants avec lui.

Thulrur effectue un net succès.
En attaquant de nouveau la large blessure ouverte par Ienzo, il libère le sang qui jaillit en véritable torrent. Le sanglier vit sans aucun doute ses derniers instants, mais il n'a toujours pas rendu son dernier souffle.

Sanglier de l'horizon

05/20 PV

La forêt éclatante de Msitu regorge d'Ether. Les animaux qui y vivent sont plus forts, plus rapides et plus agressifs qu'ailleurs.
(c'est faux, mais j'aime bien les jolies citations)

Le sanglier de l'horizon s'enfuira le lundi 4 mai 2020 à 12h (midi).

Renforçant sa prise sur le cuir de l'animal, Theluji sentit la bête vaciller, faiblissant sous les assauts des lions.
Il vit alors Cerys s'attaquer au flanc opposé au sien alors que Thulrur agressait la plaie béante ouverte par Ienzo. Le cochon chuta et le jeune enfonça ses griffes et ses crocs dans la peau de la proie tout en tentant de le lacérer de nouveau. De ses crocs, il essaya de s'attaquer une nouvelle foi à sa gorge qui n'était pas si loin que ça de lui. Il sentait que la bête était fatiguée, mieux valait abréger ses souffrances.
Le jeune lion n'aimait pas blesser en vain. Il espérait que sa tentative, couplée aux assauts de ses compagnons, serait suffisante pour en finir.

Alors que la bête s'écroulait au sol dans un grognement de rage, cette fois-ci mêlé de douleur, Cerys sentit un liquide chaud gicler sur son museau. Il était difficile de suivre les actions de chacun, mais il ne faisait nul doute que l'attaque de Thulrur venait de faire mouche. La fin n'était plus très loin. Ce n'était cependant pas le moment de perdre sa concentration bien au contraire ! Le sanglier n'avait jamais été aussi dangereux qu'à cet instant. Sentant son heure arrivée, le vaillant guerrier ne reculerait devant rien pour infliger à ses adversaires de plus de dégâts possibles. Un dernier baroud d’honneur en soi ...

Alors que Theluji tentait de prendre d'assaut la gorge de leur ennemi, Thulrur affairé au niveau du ventre et Ienzo immobilisant ses postérieurs, Cerys choisit quant à elle de raffermir sa prise. Allongée sur le flanc de l'animal à terre, ses griffes et ses crocs fermement agrippés à son cuir, son attaque n'était certes pas mortelle certes, mais son poids et sa force combinés serviraient à maintenir la bête au sol et à limiter ses mouvements. Ce n'était pas le moment que le sanglier blesse ses coéquipiers en se débattant. Rien n'était exclu, mais au moins la prise de la lionne limiterait les risques.

Theluji et Cerys effectuent chacun un succès.
Les adolescents affaiblissent encore la bête de leurs attaques. Le sanglier n'atteint finalement personne dans ses derniers efforts et, la plaie à sa nuque causant une réelle hémorragie, sa vie s'écoule hors de lui aussi sûrement que son sang.

La prochaine réponse pourra faire office de mise à mort.

Sanglier de l'horizon

« Passant, ne pleure pas ma mort - Si je vivais, tu serais mort... »

Les sabots frôlèrent sa tête à plusieurs reprises, mais ils ne touchèrent jamais, miraculeusement. Sa gueule, sa gorge se remplirent de sang chaud à nouveau, si bien qu'il en deviendrait malade. L'écroulement de la bête lui donna l'occasion de reculer sa tête, récupérer ses griffes et s'éloigner d'elle, le souffle court et les yeux plissés. Il n'était pas taillé pour encaisser des chocs pareils et cela se voyait, mais ce n'était pas son état qui l'importait à cet instant. Regardant leur proie dans ses derniers instants de vie, un sentiment d'impuissance lui faisait serrer les mâchoires, le désir d'en finir se heurtant à la fatigue de son corps. Et même s'il ne l'aurait pas été, son premier échec lui avait bien fait comprendre qu'il n'avait pas ce qu'il faut pour l'achever dignement.

Ienzo posa les yeux sur les visages flous de ses compagnons, silencieusement. Si une partie de lui était heureuse d'avoir aidé à mettre son clan à l'abri de la faim pour un certain temps, l'autre se maudissait pour ses erreurs. S'il avait été plus fort, ils n'en seraient pas là. Et des fois, il oubliait aussi qu'il était jeune, qu'il apprenait encore, maintenant dans un monde qui lui avait toujours été inconnu jusqu'à il y a six mois de ça. Mais discret comme il l'était, le caverneux eut le réflexe de cacher ses troubles derrière un air quelconque, rassemblant un peu d'énergie avant de se redresser et marcher vers la bête désormais immobile, s'allongeant prêt de sa tête, de son oreille. Tu as vaillamment combattu. Tu peux te reposer maintenant. Murmura-t-il, ces derniers mots sonnant presque comme une prière. Ce n'était pas quelque chose dont il avait l'habitude et il ne savait pas s'il serait compris au final, mais c'était le moins qu'il puisse faire pour celle qui leur permettrait de mieux survivre.

Quand un dernier souffle de vie quitta la créature, il releva la tête et la tourna vers les deux adolescents, posant un regard sur chacun d'eux. Ça va ? Si la cascade de Cerys avait été impressionnante, celle-ci n'en semblait pas incommodée, de même pour Theluji qui n'avait pas moins reçu qu'un coup à la tête. Et toi ? Cette fois, Ienzo tourna la tête dans la direction de Thulrur, le plumeau agité de sa queue trahissant son inquiétude. Il n'osait pas regarder là où les cornes lui semblaient avoir touché, découvrir le sombre du sang à la place du poil crème de son ami demeurant une projection terrifiante de son imagination.

Le sanglier pousse son dernier souffle, presque paisible, sous les murmures de Ienzo.

Félicitations à vous pour votre effort commun ! Vous avez durement gagné et mérité de quoi vous nourrir pendant une semaine entière.
Ienzo a tout spécialement brillé de par son rodéo improvisé. Le Destin lui octroie un point de compétence en équilibre.

Le mini-jeu est terminé, mais vous pouvez continuer ce Rp autant que vous voulez ! Amusez-vous et profitez bien de cette victoire !

Sanglier de l'horizon

« Passant, ne pleure pas ma mort - Si je vivais, tu serais mort... »

La frénésie s'éteint, la tension redescend, la bête se détend. Thulrur lâche doucement sa prise sur la nuque de l'animal, juste à temps pour voir Ienzo lui murmurer quelques mots d'adieu et de respect. Il se recule lentement, se lèche les babines pour espérer enlever un peu du sang qui lui couvre le visage – mais rien n'y fait, son menton dégouline encore. Essoufflé, il attend, reprend ses esprits et observe ses congénères pour repérer quelconque blessure, quelconque problème.

Mais tout le monde a l'air d'aller bien, comme s'en assure très vite Ienzo. Même ce dernier, qui avait pourtant subi le gros de l'assaut du sanglier avec Thulrur lui-même. Et, toujours parfaitement complémentaires, les deux adultes se retrouvent à se fixer, l'un s'inquiétant de l'état de l'autre en oubliant sa propre personne et vice-versa.
— Ne t'en fais pas, finit par le rassurer Thulrur en esquissant un sourire en coin. Je n'ai rien. En vérité, il se sent encore un peu déséquilibré, surtout maintenant que l'adrénaline retombe. Et toi, alors ? Rien de cassé ? Il s'approche d'Ienzo pour venir frotter son front contre le sien – pour se faire pardonner, peut-être ? car au fond, il sait ce que le caverneux va lui reprocher – sans prêter attention au fait qu'il allait sûrement le salir. De toute façon, ce n'était pas comme si Ienzo était propre non plus; les deux gaillards avaient tous les deux l'air d'avoir bu le sang du sanglier, là où les adolescents étaient encore dans un état correct.

Il se tourne ensuite vers leur proie abattue, s'attardant sur la beauté de ses défenses recourbées. Les volutes sombres ornant son pelage, là où il n'était pas déchiré. Il n'y a que deux absents à la fête : Nihahsah et Nguvu. Thulrur s'étonne que le raffut du combat ne les aient pas rameutés; étaient-ils partis ? Assez loin pour ne pas entendre les bruits de la chasse ?
Ou bien étaient-ils... occupés ?

Des sueurs froides commencent à perler sur le pelage du lion.
Sûrement le contrecoup de la charge de la bête. Rien d'autre.

— Vous avez bien combattu, les jeunes. Il leur adresse à tous les deux un sourire, mince mais plein de fierté. Il était heureux de savoir qu'ils avaient fonctionné en clan, qu'Ienzo et lui avaient pu entraîner les jeunes dans une chasse qui allait sans aucun doute faire partie de leur apprentissage vers l'âge adulte. Un peu comme une famille.

Allongée sur le flanc de la pauvre bête, Cerys sentait son adversaire perdre en vigueur. Peu à peu ses mouvements se firent moins amples, moins brutaux et finalement moins nombreux - jusqu'à devenir inexistants. Haletant bruyamment, la lionne desserra progressivement son étreinte. Puis, constatant que le sanglier était bel et bien mort, se releva non sans peine. Ses pattes flagellaient sous son poids et son côté gauche - celui qui avait été le plus exposé lors de sa chute - lui était douloureux. Jetant un coup d'œil étonné à Ienzo lorsqu'elle l'entendit proférer quelques mots à l'oreille de ce qui désormais été à ses yeux leur repas, elle préféra ne pas questionner le lion des cavernes. Quelle étrange coutume se disait-elle, mais après plusieurs mois passés aux côtés en Msafaras et des Uamuzis, Cerys avait appris à ne plus juger trop sévèrement les attitudes et croyances de ses compagnons. Elle n'était pas à même de les comprendre et il ne faisait nul doute que certains de ses propres agissements pouvaient eux aussi déconcerter les membres de la Rébellion.

- Oui, ... je vais ... bien, répondit-elle la voix légèrement roque et saccadée à Ienzo. Son regard interrogateur lui retourna la question, avant de se poser sur Theluji et Thulrur pour leur poser la même question silencieuse. Les Dieux en soient remerciés, tout le monde semblait bien se poster - mis à part quelques contusions et égratignures.

Lorsque Thulrur complimenta les deux adolescents, la lionne le gratifia d'un petit signe de tête reconnaissant, puis, elle s'éloigna de quelques pas de la carcasse pour s'allonger dans l'herbe, tentant toujours de retrouver son souffle. Elle connaissait sa place dans l'ordre des choses, et attendait donc son tour avant de prélever sa part à la dépouille du sanglier.

Son plumeau cessa de balayer la mousse de la forêt et la pression dans ses épaules retomba lentement aux réponses des uns et des autres, retenant un soupir de soulagement dans le fond de sa gorge. Tout le monde était sain et sauf, c'était le plus important, mais ce n'est pas pour autant qu'Ienzo en oublia de sermonner Thulrur quand celui-ci s'approcha de lui, répondant d'une voix douce. Non, ça va. Pour le rassurer d'abord, pressant son front contre le sien avant de lever le museau et lui chatouiller gentiment une oreille du bout de ses crocs, comme un parent avec son enfant turbulent. Mais ça irait mieux si tu ne répondais pas à l'appel du vide comme ça. Toutefois, il accepta rapidement les excuses silencieuses du grand lion en déposant une petite lèche au dos de la même oreille.

À son tour, Ienzo se détourna vers la bête, plus curieux que jamais d'observer de près une telle créature. Oh, il y avait bien des sangliers dans la mer, mais ceux-ci avaient une tout autre tête. Touchant ses défenses du bout de la patte, il en tâta la robustesse plus grande encore qu'il ne l'avait imaginé. Décidément, ils avaient eu beaucoup de chance de s'en sortir qu'avec des égratignures.
Quand Thulrur félicita les deux adolescents, lui-même acquiesça d'un hochement de tête. Leur première grosse chasse depuis leur arrivée à Nchi avait été un succès et il espérait qu'ils en seraient longtemps fiers.

Nous devrions le ramener au camp. Ses habitudes de chasseur le poussant à vouloir mettre rapidement leur repas en sécurité avant de s'en repaître, il leva la tête vers Thulrur pour obtenir son avis pendant que Cerys s'éloigna de quelques pas pour s'accorder une pause bien méritée. Qui plus est, le groupe n'étant pas au complet, ça leur permettrait de rappeler les absents jusqu'à eux.

Elle s’était éloignée plus que de raison, la Nihah. Elle savait que ce n’était pas bien. Il pouvait se passer des dizaines de choses en son absence ; des choses désagréables qui lui feraient regretter son incartade jusqu’aux derniers de ses jours. Elle soupira. Elle avait laissé le camp dans son sillage alors que l’aube venait de se lever — l’odeur de l’aurore l’avait appelée.

Pourquoi partir ? Pourquoi errer alors que son bide lui hurlait de rentrer « chez elle » ? Eh bien… Précisément parce qu’il lui arrivait de se demander où était ce lieu. Elle avait l’impression d’appartenir aux membres de la Rébellion lorsqu’elle marchait à leurs côtés, mais dès que la forêt avalait leurs ombres… Sa psychée dérivait inlassablement vers les souvenirs plus doux de son enfance. De Msafara, son clan, sa famille. Elle avait l’impression d’avoir laissé tout un pan de sa vie derrière elle, sans avoir été réellement capable de la remplir avec de nouvelles choses.

Elle se le répétait. Encore, encore. Il y avait ce sentiment de manque qui l’éprouvait, la sensation de ne plus pouvoir suivre aveuglément des ordres ; parce qu’aussi despotique qu’il était, Mu’Awiya lui donnait la « sécurité » de ne pas avoir à penser par elle-même. Elle n’avait pas à peser le pour ou le contre, n’avait pas à se questionner sur le lendemain des lions sous sa « responsabilité ».

Pourtant, dans ce capharnaüm où la peur régnait en maîtresse absolue, un murmure revenait en force sans arrêt : ce pan de sa vie abandonné ne pourrait pas être comblé du jour au lendemain. Seuls des nouveaux souvenirs créés avec des personnes qu’elle aimait pourraient les remplacer.
Et, paradoxalement, ce susurre à peine audible en début de matinée se développa tant et si bien qu’il lui aboya de rentrer en courant. Ce qu’elle fit.
Elle déboula, essoufflée, dans le camp. Son cœur battait à tout rompre. Ses sens s’aiguisèrent en le voyant si vide. Il n’y avait pas âme qui vive. Elle pourchassa les pistes abandonnées par ses camarades, les nerfs brûlés à vif. Elle avait l’impression de sentir ses neurones se frotter les uns contre les autres pour créer une flamme incandescente. Sa mâchoire se serra. Il y avait une odeur de sang dans l’air moite. Spontanément, ses muscles bandèrent à l’excès. Elle se tapit dans la végétation, le corps raide, le regard fixe. Elle se déplaça en foulées lentes jusqu’à atteindre une zone où le parfum âcre prenait à la gorge. Elle était proche.

— Nous devrions le ramener au camp.

La voix familière perça la brume qui avait envahi son esprit. Elle la ramena vers le bon sens, même si sa vision lui semblait encore recouverte par un voile sombre de la couleur du sang coagulé. Elle avait eu peur pour eux. Elle avait eu peur de les perdre. Elle serra les dents pour se faire mal, puis se glissa hors du fourré dans lequel son corps était dissimulé. Elle plissa les paupières, réduisant ses billes à l’état de deux fentes sévères. Elle jaugea la bête qui avait été abattue. C’était elle qui saignait abondamment, même si la mort avait finalement fait cesser le débit. Ses narines frissonnèrent d’une certaine aversion pour le fluide qui irritait ses sens hypersensibles.

Son inspection distante de l’animal achevée, la Nihah passa à celle de ses congénères. Là encore, la Rebelle ne rompit pas les quelques pas qui les séparaient. Elle ne savait pas réellement ce qui l’en empêchait. Elle avait seulement une douleur, ici, au niveau du cœur. Comme un poids qui lui rendait la respiration difficile. Elle se sentait écrasée ; Nihahsah avait une idée de la cause. La culpabilité. Quoi qu’il ait pu se passer au camp, elle aurait dû être là. Elle déglutit péniblement, observa chacun des Rebelles — notant au passage l’absence de Nguvu — en gardant Thulrur pour la fin. Lui plus que tous les autres devait aller bien. Elle était à peu près sûre qu’elle s’écroulerait à la seconde où il cesserait de la soutenir, de l’aider… ou de respirer.

Elle ne se détendit qu’une fois sûre que l’odeur de sang qui flottait ne venait d’aucun de ses amis ; après quoi, l’ancienne Msafara s’avança vers Thulrur qui était flanqué de son fidèle acolyte. Ces deux-là semblaient si proches que la femelle ne pouvait qu’en éprouver une certaine jalousie. C’était idiot et puéril de sa part, mais l’envie de s’accaparer le mâle le plus sombre la prenait souvent aux tripes. Ses lèvres tremblaient quand elle se décida à leur parler.

— Seigneur… Qu’est-ce qu’il s’est passé, ici ? (Elle secoua la tête pour chasser la question. Ils s’en foutaient, de ce qu’il s’était passé ! Ils devaient rentrer, et elle vérifier que ses camarades n’avaient rien sous une lumière plus clémente que le faible éclairage recraché par les feuillages.) Oubliez ça. Rentrons. Vous devez manger et vous reposer. Vous devez être épuisés…

Elle lança un regard aux jeunes. Cerys se reposait dans l’herbe humide. Elle dut retenir une envie soudaine d’aller la cajoler. Elle ne supportait pas l’idée que la môme ait pu se frotter à un truc avec des défenses aussi énormes. Elle-même ne le faisait — à l’époque — qu’avec toute une armée de lionnes entraînées et rodées. Ils ne vivaient pas ensemble depuis assez longtemps pour avoir développés des réflexes de chasse coordonnés. Elle frémit d’horreur.

— Je suis désolée de ne pas avoir été là pour vous aider. Personne n’a rien ? (Son visage se vida soudain de tout son sang. Ses yeux écarquillés exprimèrent quelque chose qui ressemblait réellement à de la terreur.) Où est Nguvu ? Vous l’avez vu ? Il était avec vous ?

Elle planta ses grandes billes sur Thulrur. Elle voulait des réponses… ou faire une syncope. C’est vous qui voyez.

Tous les Uamuzi bénéficient du bonus bien nourri (+1 à toutes les actions physiques) jusqu'au 15 mai.

De plus, les participants à la chasse (Ienzo, Thulrur, Theluji et Cerys) remportent chacun 1 petite pièce de viande ! N'oubliez pas d'ajouter votre butin à l'inventaire de votre baobab !

Un butin durement acquis

Comme il s'y attendait, Thulrur fut gratifié de remontrances de la part d'Ienzo; mais, comme à chaque fois, elles étaient douces et bienvenues. Des caresses plutôt que des coups. Oh, pas que l'enfance de Thulrur ait été bercée d'une éducation violente, loin de là ! Mais chez les Zigil, il arrivait parfois qu'on menace de jeter un enfant par-dessus la Montagne quand il en faisait trop. Alors, Thulrur ne put s'empêcher de rire doucement devant l'inquiétude d'Ienzo; en prenant grand soin de ne pas lui promettre qu'il ne recommencerait pas.

Cerys s'était déjà allongée pour se reposer – ou du moins Thulrur le supposait-il, car il était inconcevable pour lui qu'elle puisse en réalité attendre son tour – et le Montagneux lui-même se sentait encore pris de vertiges. Alors, quand Ienzo proposa de déplacer la bête, il ne sut pas trop quoi faire. Traîner cette énorme chose toute pleine de sang jusqu'au camp ? Est-ce que ça la mettrait en sécurité, ou bien est-ce que ça allait créer un chemin tout tracé vers leur petit coin caché ? Quitte à choisir, il préférait prendre le risque d'abandonner leur campement pendant les jours qu'il leur faudrait pour terminer leur buffet et déménager temporairement juste ici.

Mais dans tous les cas, il n'eut pas le temps de donner son avis : Nihahsah avait émergé des fourrés, l'air un peu paniqué. Par réflexe, et sans même y réfléchir, Thulrur afficha un sourire qui se voulait rassurant – tout le monde allait bien et ils avaient même trouvé de quoi se nourrir confortablement pendant un petit temps ! A moins que son sourire ne soit en réalité soulagé; soulagé de voir qu'elle était enfin là et, surtout, seule. A ses premières paroles, il voulut rire doucement, pour dédramatiser la situation et l'aider à se calmer – mais il fut coupé dans son élan à l'évocation de Nguvu.

Et là, deux émotions bien distinctes se mélangèrent en lui. Encore une fois, cet étrange soulagement de savoir qu'elle n'avait aucune idée d'où il était et que, de ce fait, elle n'avait pas passé les dernières minutes avec lui. Et puis, tout de suite, la culpabilité de se rendre compte qu'il se réjouissait de l'absence d'un des membres du groupe. Tout le monde était présent, sauf Nguvu, et ça faisait plaisir à Thulrur.
C'était ignoble, vilain, méchant, et il le savait très bien. Il s'en voulait déjà; mais qu'y pouvait-il ? Personne n'était parfait, et surtout pas notre lion des montagnes...

Ne laissant rien voir de son trouble intérieur, il garda au visage son sourire rassurant et s'avança d'un pas vers Nihahsah, vu qu'elle semblait – pour son plus grand bonheur – s'adresser directement à lui.
— Ne t'en fais pas, tout le monde va bien. Les gars ont trouvé ce... gros machin ? ... cet Écraseur-de-Lions et Cerys et moi sommes arrivés juste après. Nguvu n'était pas avec nous, mais je suis sûr qu'il va bien. Il a sûrement dû s'éloigner pour quelque chose... Son ton était encourageant et léger. Pourtant, il se promit d'aller à la recherche de Nguvu s'il n'était pas rentré d'ici la tombée de la nuit. Enfin, si le monde tout autour de lui arrêtait de vaciller... Tu n'as pas à être désolée, on va tous très bien, insista-t-il encore une fois. Puis, il s'assit – ou plutôt, il laissa lourdement choir son arrière-train dans l'herbe. Il continua d'afficher son sourire, quoi qu'il fut un peu bancal, comme s'il ne venait pas de perdre l'équilibre.
Il était sûr que personne ne le remarquerait.

— Allez, on sourit ! tonna-t-il un peu plus fort, comme pour détourner l'attention de sa petite personne. On a gagné un buffet pour ce soir ! Moi, je dis : ban-quet ! Et il tourna son sourire chaleureux vers les deux adolescents – ils allaient sans doute bondir de joie à l'idée d'une fête, non ? Et, avec un peu de chance, faire oublier leurs soucis aux deux adultes bileux.

Se laissant glisser au sol en voyant Ienzo achever le gros cochon, reprenant son souffle, Theluji lâcha la proie non sans se féliciter de sortir de cet affrontement sans avoir trop tâcher sa crinière de sang. S'il aimait beaucoup la chasse, il était en revanche toujours peiné de devoir passer des heures à se nettoyer par la suite. Et oui, coquetterie, quand tu nous tiens...
Quoiqu'il en fut, cette constatation fut rapidement balayée par la douleur lancinante du coup qu'il avait prit sur la tête. Rien de grave en soit car ça ne saignait même pas, mais il allait assurément avoir une jolie bosse. Tout en se frottant son petit bobo, il écouta les interactions des autres avant de se sentir gonflé de fierté sous le compliment de Thulrur. Il n'avait pas l'impression d'avoir grandement aidé mais il était tout de même très heureux de cette félicitation. Et puis surtout, il était encore à demi ivre de joie de pouvoir de nouveau courir comme avant. Cette sensation grisante lui donnait de grosses décharges d'adrénaline à chaque fois qu'il avait le malheur de se mettre à trottiner. Un drogué à la course ? Sans doute l'était-il mais il ne s'en rendait pas vraiment compte alors.

- Ça va ! Juste un peu mal au crane mais ça va !

Offrant un sourire joyeux et presque enfantin à l'assistance, il posa ses yeux clairs sur Ienzo avant de se diriger d'un pas léger vers lui.

- Tu pourrais m'apprendre à faire ce que t'as fait sur le gros cochon ? C'était trop bien et vachement efficace !

En y repensant, le lion gris avait effectué une véritable prouesse technique aux yeux du jeune et il comptait bien en apprendre d'avantage sur la chose. Ça pourrait assurément lui servir un jour et après tout, avoir plusieurs techniques de chasse à sa disposition ne pouvait pas être une mauvaise chose !
Son ouie fut alors attirée par un léger bruissement. Tournant la tête, il vit Nihahsah qui sortait des fourrés. Alors qu'il voulait dire fièrement qu'ils avaient réussit à chasser ce gros machin, il se rendit compte que les traits de la lionne était tirés. Etait-elle en colère ? Inquiète ? Il ne savait pas trop comment déchiffrer la chose mais il préféra se taire et laisser Thulrur parler. après tout, c'était bien de lui qu'elle attendait une réponse. Écoutant l'échange, il finit par lever la voix, histoire de rectifier un petit point soulevé par le lion à la crinière amusante.

- En vrai, c'est Ienzo qui l'a trouvé ! Je l'ai suivit par curiosité car je dormais pas loin quand il est passé.

Le lion clair n'aimait pas déformer la vérité aussi avait-il jugé important de rendre à César ce qui appartenait à César ou plutôt, en l’occurrence, à Ienzo.
Mais quelque chose d'étrange semblait être arrivé en même temps que l'arrivée de la lionne sable. Theluji n'aurait pu dire ce que c'était mais il y avait quelque chose dans l'air qui avait changé... Bah, pas la peine d'essayer de comprendre ce que c'était. Peut-être le saurait-il un jour, ou peut-être pas ! L'important pour le moment, c'était de prendre l'ampleur de leur haut fait du jour. Et ça, le lion brun semblait l'avoir comprit.

- Un banquet ?!

Les iris du Shehe venaient de s'agrandir d'un coup sous la simple évocation de ce petit mot. Qui disait banquet disait fête et qui disait fête, disait fun ! Et lui, il aimait ça !
Délaissant les côtés de Ienzo, le jeune bondit joyeusement en tous sens au milieu de l'assemblée de façon erratique avant de s’arrêter prêt de la proie encore chaude.
S'éclaircissant la voix, il se mit à parler avec emphase d'un air volontairement théâtrale et taquin, désignant l'herbivore d'un geste nonchalant :

- Moi, Thelu de Ji, jeune lion de mon état, déclare officiellement ce joyeux banquet ouveeeeeeert !

A aucun instant le jeune s'était dit qu'il ferait peut-être un immense bid ; il n'y avait pas pensé. Il n'avait pensé qu'à une chose : s'amuser et faire fuir cette chose étrange qui flottait dans l'air.

Dans l'attente de connaitre l'avis de Thulrur, il tourna la tête vers Theluji qui lui demanda de lui apprendre sa technique de chasse - bien que celle-ci avait été largement improvisée, lui faisant étirer un sourire à la fois attendri et flatté. Merci, et bien sûr. Ça allait être compliqué de s'entraîner sans d'autres proies comme celle-ci, mais ça n'empêcherait pas Ienzo d'essayer de lui enseigner la technique.

Un soudain mouvement dans les buissons força son corps à se redresser trop vite, quelques étoiles revenant étinceler devant ses yeux, mais il se détendit aussitôt que la silhouette de Nihahsah se détacha de la végétation. À la vue de la bête et des museaux tâchés de sang, sans compter l'odeur, il trouva naturel que celle-ci soit tendue, alors d'un petit geste de tête, il essaya de la rassurer sur leurs états, la pauvre lionne se confondant en paroles, questions et excuses, surtout lorsqu'elle réalisa l'absence de Nguvu - et lui aussi, d'ailleurs.
Une inquiétude se mit à poindre au creux de sa poitrine, son regard balayant les alentours à la recherche d'une trace du mâle. Toutefois, avant que la crainte ne puisse réellement s'implanter dans son esprit, le mouvement lourd du montagnard attira son attention, ses oreilles redressées et les babines tirées. Serait-ce pour ça qu'il ne lui avait pas répondu ? Lui aussi a du mal à se remettre du choc ? D'un pas, Ienzo s'approcha en silence, levant un regard vers lui. Peut-être qu'une pause avant de rentrer ne serait pas de refus. En faisant sa proposition, il avait glissé un regard à Nihahsah avec un sourire au coin des babines.

Puis, Theluji rectifia un point qu'Ienzo aurait préféré taire. Les yeux écarquillés, il fixa le vide pendant un instant avant de lentement relever la tête, la mine gênée, offrant son plus adorable sourire à ses deux camarades dans l'espoir d'échapper aux remontrances, comme un lionceau devant sa bêtise. Ah, il est beau le moralisateur. Il m'aurait entendu si j'avais fait demi-tour... Souffla-t-il pour essayer de justifier son coup de sang chaud.

Heureusement, la discussion tourna rapidement autour du festin que la rébellion allait s'accorder, lui permettant de reprendre sa place au second plan et s'allonger dans les herbes comme si regarder l'adolescent bondir d'un côté et de l'autre lui suffisait pour fatiguer. En réalité, l'éternel discret ne voulait simplement pas être le premier à plonger ses crocs dans la carcasse, préférant soupirer d'amusement face à la scène d'ouverture de banquet.

À la seconde où Thulrur s’approcha, la Nihah sentit les muscles de ses mâchoires se desserrer. L’ombre d’un sourire apaisé caressa ses lèvres alors que ses prunelles s’arrimaient à la paire d’en-face. Son pouls s’accéléra, lui, paradoxalement. Elle laissa échapper un rire nasal à cause du surnom écopé par la proie allongée. Elle se murmura silencieusement que l’animal ressemblait à un phacochère. Un peu. Il y avait des ressemblances, du moins.
Elle pinça les lèvres, soucieuse, lorsqu’il avoua ne pas savoir où était Nguvu. Elle se jura de le chercher dans les heures prochaines. Elle ne voulait pas que ses proches soient laissés derrière, même pas pour un repas. Le mâle devait marcher à leurs côtés s’il voulait se faire une place dans le groupe.

Thulrur se laissa glisser au sol dans un bruit sourd, ce qui la réveilla. Elle posa sur lui un œil curieux, puis ravala la boule qui lui nouait le bide une fois invitée à sourire. Elle haussa un sourcil, décocha un large croissant à l’assemblée, puis un regard malicieux à son phare. Elle pouvait compter sur lui pour lui remonter le moral ; il n’y manquait jamais. L’expression de la Nihah repassa brièvement à la panique en réponse aux exploits d’Ienzo. Comme quoi, les plus intrépides n’étaient pas forcément ceux auxquels on pensait… Elle ne chercha néanmoins pas à le gronder. Il n’était plus un enfant. Il devait connaître ses limites ; s’il avait osé prendre l’animal en chasse, c’était qu’il croyait en sa réussite d’une manière ou d’une autre. Un adolescent se chargea de couper court à la possible mauvaise ambiance susceptible de s’installer.

Elle pouffa derrière ses coussinets levés à ses lèvres face à la joie de Theluji, lui accorda une petite révérence en lâchant un : - Vous êtes trop aimable avec le bas-peuple, Monseigneur ! Inviter la plèbe à dîner… Voilà qui est généreux !

Elle s’approcha pour lui donner un léger coup de coude amical, puis s’avança timidement jusqu’à la proie. Ancienne chasseresse du Yetupeponi, la Nihah savait comment découper efficacement les cuirs pour dégager les organes préférés des lions. Elle l’éventra dans le premier temps, récupéra précautionneusement les viscères sales sans les percer pour ne pas souiller la viande, les laissa de côté pour qu’ils ne soient pas gênés, puis arracha la couche de peau poilue pour libérer les chairs rougies à grands coups de crocs. L’opération demandait souvent beaucoup d’énergie. Elle dénuda suffisamment sur l’abdomen pour se retourner vers ses compagnons, leur adressant un petit signe pour qu’ils approchent. - Prenez les meilleurs morceaux, murmura-t-elle aux plus jeunes du groupe. Ils avaient besoin de grandir, donc de se nourrir de viandes riches. Elle se laissa choir un moment sur le séant, les muscles noués. Elle était fatiguée de la journée trop pleines d’émotions.

L'effervescence de Theluji réussit magnifiquement à détourner l'attention du groupe et à mettre tout le monde dans une ambiance de fête – et tant mieux, parce que le regard de Thulrur fusillait déjà le pauvre Ienzo. Comment ça, c'est Ienzo qui l'a trouvé ? Le montagneux fut donc contraint de ravaler ses sermons; et puis de toute façon, les Rebelles s'étaient déjà tournés vers la nourriture.

Nihahsah, en parfaite maîtresse de maison, commença à découper le gigot. Thulrur aurait bien voulu l'aider, mais il était toujours en proie aux vertiges – heureusement, son déséquilibre se calma quand elle eut fini et s'écarta pour laisser les jeunes manger en premier. Ça devait les changer de chez les Msafara, ça ! Le mâle se releva alors et s'approcha de la carcasse, mais préféra attendre d'être vraiment remis sur pattes avant de se jeter dans la boustifaille.

Le banquet promettait d'être joyeux et de resserrer encore les liens qui les nouaient tous ensemble. Plus que jamais, les Uamuzi étaient un véritable micro-clan.