Deux jours s'étaient écoulés depuis la "fête" des Cidanka, et j'en gardais là un bien mauvais souvenir. J'avais été obligé de me battre pour le plaisir des yeux des uns et des autres. Même Nahama avait prit plaisir à participer au combat, et cela m'avait particulièrement choqué. Bien-sûr, j'appréciais toujours la rouquine, et elle restait mon amie, la seule d'ailleurs, mais son entêtement, et sa rage de vouloir vaincre le Champion m'avaient laissé un gout amer dans la gorge.

Mon corps était particulièrement douloureux depuis cette fameuse soirée de fête, et de nouvelles cicatrices étaient apparu sur mon corps sableux. Comment les Cidanka pouvaient-ils apprécier cette façon de vivre ? Tout cela restait un mystère pour moi.

Mon apprentissage en tant que Toubib continuait, et ce matin, il avait fallut amputer une lionne qui s'était cassé la queue en tombant dans la ravine. Heureusement pour elle, elle allait s'en remettre, ce qui n'était pas le cas de la plupart des lions amputés.

J'étais assez fière de moi aujourd'hui, car pour une fois, l'amputation ne m'avait pas écoeuré, ou du moins, je n'avais pas rendu mon déjeuner, et cela était un grand exploit ! D'ailleurs, même mon mentor du jour me félicita, lui qui savait à quel point j'étais sensible.

La journée s'était donc, à mes yeux, plutôt bien passé, et c'est avec un léger sourire que je retournais à mon terrier. Le ciel était voilé, et quelques gouttes d'eau s'écrasaient sur le sol poussiéreux de la caserne. Assise devant l'entrée de mon terrier, j'observais la lionne qui avait eu la queue amputé le matin même. J'étais assez surprise de voir qu'elle semblait aller pour le mieux. Montrant sa queue coupée à ses congénères, elle riait comme ci de rien était. Décidément, ces lions étaient bien étranges... Mais il fallait avouer que ce n'était pas des petites natures.

Le Grand Consul avait eu une merveilleuse idée en organisant cette fête ! Si seulement il pouvait le faire plus souvent.

Un ciel voilé, une atmosphère chaude et tropicale ; Togotan était d'humeur assez maussade ce jour-là. Il regrettait déjà l'ambiance de la fête de deux jours plus tôt. Le vacarme de tous ses camarades, les rires, les chants, et surtout les combats ! C'est notamment celui opposant le Champion du Consul et les plus jeunes combattants qui avait émoustillé notre gros molosse. Ce lion avait été un opposant remarquable, Togotan avait adoré se battre contre lui et n'attendait qu'une seule chose avec une bouillante impatience : remettre ça.

Malheureusement, cette journée ne semblait ni propice aux bagarres, ni propice à la fête. Ha ce qu'il pouvait s'ennuyer lorsqu'il ne pouvait ni se goinfrer ni s'entraîner. Il regretterait presque son statut d'apprenti canonnier. Mais c'était sans compter sur l'arrivée soudaine d'une lionne de sa cohorte dans la caserne.

La femelle débarqua en trottinant, tête haute, yeux clos et un grand sourire aux babines : "Devinez qui a son premier grand souvenir de guerre ?" s'exclama-t-elle, dressant fièrement sa queue vers le ciel. Togotan, alors allongé de tout son long sur le sable chaud de la caserne, se redressa, bouche-bée.

- Une amputation ?! Ça alors, t'as une de ces chance ! Quelques lions s'avancèrent autour de la jeune amputée, dont notre jeune molosse.

- Et ouais ! En plus ça ne me gênera presque pas pendant les combats ! Il me suffira simplement de retravailler mon équilibre et le tour est joué !

"Woaah" s'émerveilla en coeur le groupe de jeunes.

- C'est pas n'importe qui qui a cette chance ! s'exclama maladroitement notre bougre d'âne. C'est qui qui t'a prise en charge ?

- La nouvelle, là-bas. Elle est plutôt douée pour une débutante ! Elle pointa une lionne qui ne lui était alors pas inconnue. Évidemment, l'amputée avait pointé la femelle du bout de sa toute nouvelle queue raccourcie, ce qui avait bien amusé ses camarades. Togotan en profita pour s'éclipser, se dirigeant vers la désignée. C'était Nsiese, la petite lionne qui avait combattu à ses côtés lors de la cérémonie.

- Eh, salut ! C'est toi qui a amputé Nashiva ? T'es vraiment très douée tu sais ! Jamais je n'serais capable de faire de telles prouesses ! J'espère que c'est toi qui t'occupera de moi quand j'aurais de vraies blessures de guerre, moi aussi ! lança-t-il avec un grand sourire.

La lionne tout juste amputée fut rejoint par d'autres lions, et tous riaient en chœur pendant que celle ci racontait ses exploits. La scène, bien que surprenante, m'amusait. Comment pouvait-elle être contente d'avoir perdu sa queue ? Décidément, j'avais vraiment du mal à comprendre les Cidanka...

Mon sourire s'effaça lorsque la lionne me pointa du bout de sa demi queue. Avais-je fais quelque chose de mal pour que tous m'observent d'un coup de cette façon ?

Je reconnu alors Togotan, avec sa grosse crinière soyeuse qui s'approcha de moi avec un sourire. Eh, salut ! C'est toi qui a amputé Nashiva ? T'es vraiment très douée tu sais ! Jamais je n'serais capable de faire de telles prouesses ! J'espère que c'est toi qui t'occupera de moi quand j'aurais de vraies blessures de guerre, moi aussi !

Moi ? Douée ? ... J'affichais une mine perplexe, ne m'attendant pas du tout à ce que quelqu'un vienne me féliciter d'avoir réussi une amputation proprement. Mon regard passa du colosse doux à la dénommée Nashiva, qui semblait elle aussi contente de moi, car elle m'afficha un sourire avec un signe de tête approbateur. Clignant des yeux sans vraiment comprendre, je fini par lâcher un vulgaire "euh... Merci !" au gros nounours qui venait de me complimenter.

- J'espère au contraire pour toi que tu seras soigné par une vraie Toubib. Ajoutais-je en essayant de plaisanter pour me détendre. En général, je rend mes repas à chaque amputation que je dois effectuer...

Cela était franchement gênant, mais je n'allais pas chercher à me venter de prouesses qui se trouvaient être fausses. Ce matin, j'étais parvenu à prendre sur moi pour amputer une queue, ce qui restait assez simple à faire. Peut-être commençais-je à m'habituer à la vie Cidanka, mais une chose était sûre, il y'avait encore beaucoup de travail...

- Tu t'es bien battu l'autre soir, c'était vraiment impressionnant ! Je ne suis pas habitué à ce genre de fête...

Pourtant, intérieurement, je me souvenais encore de l'adrénaline qui était monté en moi lors du combat, et ce gout de sang sur ma langue... Tout cela m'était étranger, et pourtant, une partie de moi souhaitait recommencer.

La réponse de la jeune Toubib ne put l'empêche de le faire rire. Et son sourire s'étira de plus belle lorsqu'elle le complimenta sur ses prouesses lors de la fête.

- Merci beaucoup ! Je me suis bien amusé ! répondit-il, fier de lui. Mais tu t'es très bien débrouillée, toi aussi ! Surtout pour une apprentie Toubib qui vient à peine de rejoindre le clan !

Son ton était léger, sa voix douce bien que toujours très grave. Après tout, il était difficile pour lui de faire autrement. Cette voix, il l'avait depuis un bon moment maintenant. Il avait mué bien plus tôt que ses petits camarades. Ses poils ne s'étaient clairement pas faits prier non plus d'ailleurs. Quand à ses muscles… n'en parlons pas ! Il est vrai que Togotan était un lion impressionamment bien battit. Il serait un parfait géniteur et en avait bien conscience mais il détestait qu'on le rabaisse à ça uniquement.

Après tout, il avait bien d'autres qualités : il était gentil, attentionné et… c'est déjà bien suffisant ! Peu de Cidankas pouvaient se vanter d'avoir un fond aussi pur que lui. Enfin, on parle bien de son coeur, pas de son estomac…

Il s'assit lourdement, signe qu'il comptait bien discuter un peu plus longtemps avec sa nouvelle camarade.

- Tu n'as pas trop de mal à te faire à ta nouvelle vie ? demanda-t-il, penchant légèrement la tête sur le côté dans une moue compatissante.

Le gros lion dont le visage disparaissait presque dans son épaisse crinière afficha un large sourire lorsque je l'eu félicité pour ses prouesses au combat face au champion dans l'arène. Il fallait dire que Togo s'était montré très courageux et n'avait pas eu froid aux yeux durant cette bataille générale.

- Merci beaucoup ! Je me suis bien amusé ! Avait répondu le géant pleins de poils. Étonnamment, je devais avouer que moi aussi, je m'étais bien amusé durant ce combat "amical". Si au début j'avais fortement hésité à me lancer dans la bataille, le reste de la fête m'avait beaucoup plu. Me battre aux côtés de Nahama, Jacayl et Togo m'avait empli de fierté.

Mais tu t'es très bien débrouillée, toi aussi ! Surtout pour une apprentie Toubib qui vient à peine de rejoindre le clan !Un petit rire timide sorti de ma gorge, et, si ma fourrure avait été transparente, Togo aurait pu remarquer que mes joues rougissaient. Je ne m'étais pas si bien battu que ça, n'ayant qu'un bref entraînement au combat étant donné ma position de Toubib, mais le compliment du molosse me donna le sourire. Merci, avais-je répondu d'une petite voix. Je dois avouer que j'ai encore des courbatures ! Ajoutais-je avec un peu plus d'assurance.

La douleur qui me dérangeait le plus était ma patte qui avait été mâché par le champion. Cette ci était encore douloureuse, mais je pouvais de nouveau la poser au sol, et aucune infection ne semblait arriver, donc aucune inquiétude à avoir. Dans quelques jours, les crouttes disparaîtraient pour laisser place à une jolie cicatrice qui me rappellerait cet étrange souvenir.

- Tu n'as pas trop de mal à te faire à ta nouvelle vie ? Me demanda alors le gros lion qui venait de s'asseoir devant moi. Si, depuis l'arrivée de Togo, j'avais affiché un sourire sur mon visage, celui ci disparu d'un coup. La question de Togo me rappela que, il y'avait de cela encore quelques jours, je ne supportais pas ma vie au sein des Cidanka. J'avais beaucoup de mal à m'intégrer, et seul ma conversation avec Jacayl m'avait permit de comprendre que les Cidanka n'étaient pas que des crétins sans cervelle.

- Ce n'est pas toujours simple, avouais-je. Les premiers mois se sont révélés être un véritable calvaire. Tu as vu ma taille ? J'ai l'impression d'être un lionceau à côté de la plupart d'entre vous ! Je pouffais de rire un instant en comparant ma taille à celle de Togo, pour ensuite reprendre. Mais, Jacayl m'a ouvert les yeux. Vous êtes un clan très uni, et solidaire. Peut-être que ce n'est pas si horrible de vivre ici après tout. Avais-je conclu avec un sourire. Mais dis moi, tu as mangé quoi pour devenir si imposant ? Il faudrait que tu me donne la recette ! Je crois que j'en ai bien besoin !

Le rire du molosse raisonna dans la caserne, rauque mais qui insufflant la joie. Il est vrai que sa nouvelle camarade ne possédait pas un gabarit très avantageux. Encore moins comparé à lui.

La suite des paroles de la lionne lui firent décrocher un sourire attendrit. Togo n'avait généralement pas grand chose qui lui tourmentait l'esprit : il était d'un naturel jovial et optimiste. Mais il se sentait encore plus heureux lorsqu'il savait les siens sereins et en bonne santé. Il asséna une accolade amicale à Nsiese.

- Tant mieux. Je suis rassuré dit-il, l'air doux et fraternel.

Lorsque la femelle ré-engagea la discussion sur un ton plus léger, Togotan ne pu s'empêcher de pouffer à nouveau :

- Ah, ça, c'est ma petite recette mystère !... Et un peu de génétique, je suppose. Mais surtout ma recette ! s'exclama-t-il sur un ton humoristique. Il semblait soudain extrêmement enjoué et il se rapprocha tout à coup de l'oreille de sa camarade, regardant à droite à gauche, comme s'il allait lui confier le plus éminent de tous les secrets : La panse de bison. Avec une touche de graisse de sanglier. Ça n'a pas très bon au goût. Mais je peux te jurer que c'est le remède parfait pour prendre en masse, autant en graisse qu'en muscles ! Puis il se redressa avec un sourire jusqu'aux oreilles, très fier de sa mixture.

L'Ours semblait content de ma réponse. il afficha un sourire compatissant. Peut-être comprenait-il qu'arriver dans un clan qui n'avait rien à voir avec tout ce que nous connaissions avant, où il fallait apprendre à se battre, à soigner tant bien que mal, et à obéir aux ordres de cette façon n'était pas simple, voir même terrifiant lorsque l'on était une petite Nsiese habituée à son petit confort.

Le molosse, malgré sa grande taille imposante et son air impressionnant, se révélait être un véritable nounours. Son rire, bien que grave et profond, était également tout ce qu'il y'avait de plus sincère, et son regard bleu était un océan de douceur. Cela ne faisait que peu de temps que nous discutions, et pourtant, j'avais l'impression de me sentir déjà mieux. Togotan me mettait à l'aise, et apparemment, lui aussi semblait m'apprécier un minimum. Me donnant une tape dans le dos, il répondit avec un sourire Tant mieux. Je suis rassuré, lorsque j'eu terminé mon petit monologue sur mon ressenti concernant le clan.

Puis, à l'énoncé de ma question concernant son gabarie de gros nounous en peluche, celui ci pouffa d'un rire encore plus puissant que les précédents. Ah, ça, c'est ma petite recette mystère !... Et un peu de génétique, je suppose. Mais surtout ma recette ! S'exclama t-il joyeusement avant de se rapprocher de moi, comme si il s'apprêtait à me révéler la chose la plus importante au monde. La panse de bison. Avec une touche de graisse de sanglier. Ça n'a pas très bon au goût. Mais je peux te jurer que c'est le remède parfait pour prendre en massivement, autant en graisse qu'en muscles ! Me chuchota t-il à l'oreille, avant de me sourire fièrement.

Disait-il vrai ? Etait-ce vraiment une recette de Cidanka qui fonctionnait pour devenir comme Togotan ou encore le champion du Grand Consul ? Ou bien se moquait-il de moi en m'énonçant toutes sortes de choses plus écœurantes les unes que les autres... ?

J'observais le mâle, un air interrogateur sur mon visage. Je ne savais pas si je devais rire, ou bien écouter ses conseils avec attention. Je ne suis pas certaine de vouloir essayer ta recette en fin de compte... Avais-je répondu, mi amusée, mi dégoûtée. Je crois que je préfère autant rester la petite crevette du groupe !

Et pourtant, mon petit gabarit de sauterelle me désavantageait beaucoup face aux Cidanka. Mais, à ce que j'avais vu des Khomba, ils étaient beaucoup moins imposants que le clan dans lequel je vivais actuellement. Je me demandais d'ailleurs comment cela se faisait-il que les Cidanka soient toujours en guerre face aux Khomba alors qu'ils semblaient tout rachitiques à côté des colosses tel que Togotan.

- Dis moi Togo, j'ai aperçu plusieurs Khomba en allant chasser du côté de la rive, et ils semblaient aussi rachitiques que moi, comment ça se fait que vous n'ayez jamais gagné la guerre ? Vous devez pourtant leur rouler dessus lors des batailles non ?

Ma question pouvait sembler bête, et pourtant, je n'arrivais pas à comprendre comment des mastodontes comme les Cidanka étaient en guerre depuis des générations face à des lions comme les Khomba, qui semblaient surtout péter plus haut que leur cul...

- Oh ! Ça, c'est que tu n'as pas dû croiser de vrais guerriers Khombas ! affirma-t-il, l'air totalement abasourdi par ce qu'il venait d'entendre. Puis le souvenir de la bleue qu'il avait rencontrée quelques jours avant la fête lui traversa l'esprit un instant. Mais il secoua vivement la tête
Tu verras lorsque la prochaine guerre éclatera, nous aurons l'occasion de nous battre contre de véritables mastodontes, comme Horyaal ! dit-il avec conviction, bien tentant presque de se convaincre lui-même.

Après tout, le seul Noble qu'il avait aperçu pour l'instant était une lionne. Mais, surtout, ce n'était certainement pas une guerrière Khomba. Enfin.. Si c'en était une, alors Togotan ne saurait plus quoi penser. Il cligna des yeux un instant, perplexe face à ce songe. Mais heureusement, il croyait bien trop aux contes que son clan lui racontait lorsqu'il était enfant pour se laisser déborder par une assurance déplacée.

Notre gros mâle secoua sa tête, remettant bien vite ses idées en place. Son épaisse crinière s'agita devant son visage. Il n'avait aucune raison de douter des dires de ses aînés ; ils étaient bien plus renseignés que lui sur le sujet. Après tout, ils avaient assisté à de nombreuses batailles, eux.

- Si nos puissants et valeureux aînés Cidankas n'ont pas encore réussi à battre les Khombas, c'est sans aucun doute parce qu'ils ont trouvé des adversaires à leur hauteur ! termina-t-il, emplit d'adrénaline rien que de s'imaginer affronter l'un d'entre eux. Des frissons d'excitation lui traversèrent l'échine et il se dressa fièrement.

- Tu ne nous prends tout de même pas pour des demeurés, hein ? demanda-t-il, fronçant un brin les sourcils. Puis il se reprit avec un air qui se voulait moins accusateur : Je veux dire par là que tous les guerriers Cidankas ne sont pas aussi bêtes que moi ! Ils ont la puissance aussi bien que l'intelligence. Alors si les Khombas leur ont résisté si longtemps, c'est qu'ils ne sont certainement pas que de vulgaires pachas fébriles. Et c'est justement ça qui nous motive autant à nous confronter à eux : leur robustesse ! Ce sont des adversaires redoutables ! Nombre de nos ancêtres sont tombés au combat contre ces monstres… Ils ont payé de leur vie pour défendre nos terres. Insinuer de ces nuisibles qu'ils ne sont pas des soldats à la hauteur des nôtres serait manquer de respect à nos regrettés disparus.

Malheureusement, Togotan ne put s'empêcher d'avoir l'oeil sévère. Nsiese ne pensait certainement pas à mal en disant cela mais, comme tout Cidanka pure souche, il détestait que l'on ne mesure pas ses paroles lorsque l'on parlait du conflit qui faisait rage entre sa Famille et ces Traîtres.

- Oh ! Ça, c'est que tu n'as pas dû croiser de vrais guerriers Khombas ! Avait répondu du tac-o-tac le mâle, qui semblait choqué de m'entendre dire cela. C'était vrai, je n'avais croisé que Lindiwe et Impuku, - dont j'ignorais le nom - mais rien que de comparer les deux femelles Khomba aux femelles Cidanka, il y'avait déjà une bonne différence de gabarit, alors, je me demandais si pour les mâles, c'était la même chose.

- Tu verras lorsque la prochaine guerre éclatera, nous aurons l'occasion de nous battre contre de véritables mastodontes, comme Horyaal !

Eh bien, une chose était sûre, ce n'était pas pour tout de suite que j'irais me battre face à un lion aussi gros que le Champion du Consul... En sachant que Horyaal nous en avait fait bavé, à nous quatre alors que c'était un combat amical, je n'imaginais même pas devoir me battre réellement face à un monstre de cette taille.

- Si nos puissants et valeureux aînés Cidankas n'ont pas encore réussi à battre les Khombas, c'est sans aucun doute parce qu'ils ont trouvé des adversaires à leur hauteur ! Continua Togotan, prit dans l'élan de ses explications. Il avait sans doutes raison, pensais-je intérieurement, mais avant que je le lui dise de vive voix, le mâle continua son monologue, mais cette fois ci, son ton était sévère, moralisateur.

- Tu ne nous prends tout de même pas pour des demeurés, hein ? [...] J'écoutais les paroles du nounours, me sentant de plus en plus mal. Il avait mal prit ma question, alors que je n'avais jamais voulu rabaisser les guerriers Cidanka, qu'ils soient morts ou vivants. J'avais simplement voulu expliquer qu'il m'était difficile d'imaginer les Khomba aussi forts que les Cidanka, et voilà que Togo s'imaginait que j'avais voulu me moquer du clan, ou je ne sais quoi d'autre... Mon sourire avait complètement disparu, et je pouvais sentir mon visage devenir rouge tomate tellement ma gène était grande.

Si notre discussion avait commencé sur une ambiance bonne enfant, cela avait rapidement changé, et la réaction de Togotan venait explicitement de me rappeler que je ne faisais pas parti du clan. Les oreilles baissées, la tête basse, je me sentais terriblement mal.

- Je... Bagayais-je. Je suis navrée... Je n'ai jamais voulu manquer de respect aux guerriers Cidanka... Honteuse, je regardais le sol qui me semblait tout d'un coup vraiment intéressant. Je... je cherchais simplement à plaisanter un peu, et en apprendre plus sur les Khomba... Je... Je ne vous trouve pas demeurés, et tu es loin d'être un lion bête Togotan... Tu es vraiment gentil, et je suis désolée de t'avoir blessé...

Ne pouvant plus supporter la gène présente, je préférais mettre un terme à cette discussion. Togotan m'avait fait bonne impression, et savoir que je l'avais vexé, ou qu'il avait l'impression que je lui manquais de respect me donnait envie de me terrer à jamais tel une taupe. Hm... Me raclais-je la gorge, je... je dois aller m'entraîner avec Nahama, j'avais oublié... Euh, à bientôt...!

Puis, sans demander mon reste, je filais à travers la caserne, loin, très loin du regard du molosse au coeur tendre. Je ne m'étais jamais senti aussi mal à l'aise de toute ma vie. C'était l'histoire de ma vie, voilà que je commençais à apprécier de vivre chez les Cidanka, et voilà que je faisais une grosse boulette... C'est donc sur cette note négative que ce terminait cette journée qui avait pourtant bien démarrée.

Après ses excuses des plus désolées, Nsiese fila en un éclair, sans que Togotan ne puisse même se rendre compte de la gêne qu'il venait d'instaurer entre eux.

- Euh.. D'accord ? répondit-il, un brin perplexe. Pourtant, il se reprit bien vite, terminant avec un air à nouveau aussi jovial qu'au départ, comme si de rien n'était. Car c'était le cas. Du moins, pour lui : Bon entraînement alors ! Mais sa nouvelle camarade était déjà bien loin, sûrement trop pour l'entendre.

Togo afficha un instant une moue soucieuse... puis finit par hausser les épaules, passant rapidement à autre chose. Il ne se doutait pas une seule seconde avoir pu mettre mal à l'aise sa nouvelle camarade de par sa réaction. Pourtant c'était bien le cas.

Notre gros bêta se leva alors et, son fameux sourire béa accroché aux babines, il rejoignit à nouveau le groupe de jeunes guerriers Cidankas avec lequel il discutait auparavant.