Astou venait de revenir de la chasse avec deux petits lapins. Pas très gros, elle se permit donc de les donner à son fils avant de repartir chercher autre chose à se mettre sous la dent. Toujours inquiet pour ses amies parties dans la forêt, Muuji n’avait pas le cœur à manger seul, l’appétit ne lui venait d’ailleurs pas vraiment. Il décida donc de partager son repas avec un de ses camarades. Il hésita avec la nouvelle venue, Esi s’il se souvenait bien. Mais ne la connaissant pas encore vraiment, il préféra se tourner vers quelqu’un d'autre.

C’est alors qu’il aperçut son grand-cousin à quelques mètres de lui. Enthousiaste mais hésitant, Muuji traîna les deux prises de sa mère avec lui jusqu’à l’adulte souffrant, levant bien les pattes pour ne pas marcher dessus. Arriver devant lui, il les posa au sol.

Je peux manger avec toi, Mu’Awiya ? Maman en a ramené deux… demanda-t-il d’une petite voix.

Mu'Awiya l'avait vu arriver de loin, le jeune Muuji. Il levait ses jambes comme un échassier, cherchant à ne pas abîmer la viande. Si la vision l'aurait sourire, d'ordinaire, Mu'Awiya n'avait pas le coeur à la blague et se contenta de lui suivre du regard.
L'enfant posa deux lapins assez maigres sur le sol, devant lui. Il demanda par la suite :

« Je peux manger avec toi, Mu’Awiya ? Maman en a ramené deux… » Sa voix était fluette, craintive, c'était celle d'un enfant. au fond, le mâle ne connaissait qu'assez peu son petit cousin qu'il voyait d'avantage comme un neveu. Il hocha doucement la tête et s'allongea devant les lapins, histoire d'être à la hauteur de son cadet.

« Si tu le souhaites, Muuji. » Répondit-il dans un premier temps, sans pour autant toucher à la viande. La nausée l'empêchait de manger, du moins, présentement. Il craignait de tout vomir immédiatement.

« C'est ta maman qui les a chasser, c'est ça ?... Tu seras bientôt en âge de le faire de toi-même. »

Muuji s’allongea donc devant Mu’Awiya, rapprochant un lapin de son aîné avant d’en tirer un vers lui. Le petit prit de petites bouchées, l’appétit lui viendrait peut-être.

Oui, c’est maman qui les attrapés. affirma-t-il. Je n’ai pas son expérience, mais... j’essayerai d’apprendre tout de même.

Muuji n’osa pas dire à son cousin que la chasse n’était pas son truc, bien qu’il n’ait jamais vraiment essayé. Le mâle, avec son père, représentait les figures d’autorités, chose qu’il serait peut-être un jour. Et il ne voulait pas décevoir ses grands félins en se comportant comme le petit terrorisé qu’il était.

Tu ne manges pas ? Maman dit que l’appétit vient en mangeant…

« Oui, c’est maman qui les attrapés. Je n’ai pas son expérience, mais... j’essayerai d’apprendre tout de même. » Répondit l'enfant, s'allongeant en face du mâle adulte. Mu'Awiya dû reconnaître qu'il était bon d'être humble, surtout à son âge et il ressentit un petit picotement au ventre en voyant son petit cousin lui parler avec cet espèce de respect dans le regard.

« Tu ne manges pas ? Maman dit que l’appétit vient en mangeant… » Mu'Awiya l'observa, puis il détourna le regard, fatigué. Il secoua la tête à la négative.

« Je vais manger, ne t'en fais pas pour moi. »

Mu'Awiya n'aurait jamais d'enfant. Ce fut la triste constatation qui accentua ses nausées. Il allait mourir sans descendance, dans quelques jours, quelques semaines tout au plus. Il le sentait au fond de lui, cette maladie. Dire qu'il avait laisser filer Nihahsah sans en venir au fait, dire qu'il n'avait rien tenter envers Kosa quand il le pouvait encore... Et maintenant, même s'il le voulait, même si les lionnes n'opposait aucune résistance, il ne trouverait pas la force de les saillir.

« C'est bien pour un lion d'être débrouillard et éclectique, tu sais ? Chasser, se battre, traquer... Ce sont des qualités qui te permettront d'être un élément utile au clan. » Il reposa les yeux sur lui, parlant avec bienveillance. Il n'y avait aucune arrière pensée dans ses paroles, il déversait ses conseils comme il l'aurait fait avec ses enfants. « Après tout, comme Mu'Awiya le fut à ton âge, tu es l'avenir de notre clan. » Et il eut même le droit à un sourire, le petit Muuji, un sourire tranquille, calme.

Muuji ne remarqua même pas que le chef de leur petite troupe venait de parler de lui à la troisième personne, bien trop occupé à boire ses enseignements comme le petit lionceau qu’il était encore.

J’apprendrai à devenir un grand lion, comme toi et papa. affirma-t-il entre deux bouchées.

Le Msafara ne se moquait pas le moins du monde de son cousin, ses paroles étaient sincères. Seyf et Mu'Awiya étaient de grands lions, avec une grosse crinière, bons dans tout ce qu'ils entreprenaient. Le cousin de sa mère n'avait certainement pas une superbe allure ces temps-ci, mais Muuji se souvenait du lion qui les avait guidés pendant leur long périple. Il le suivrait aveuglément n’importe où.

Tu… Tu voudras bien m’apprendre quelques astuces… ? Quand je serai plus grand… lui demanda-t-il timidement.

Héka et Kosa allaient revenir avec le remède. Il avait d’abord douté des indications données aux lionnes, mais trop torturé, Muuji avait fini par se persuader de leur retour. Peut-être avait-il tord.

Muuji se voyait déjà s’entraîner avec Mu’Awiya, dans leur prochain Eldorado. Honorer sa famille… L’honneur était encore une notion assez floue pour le jeune Msafara. Oui, il était fier de faire partie de la caravane de survivants. Ils avaient tous survécu à une catastrophe, mais ils étaient toujours là, signe de leur force. Mais il ne se rendait puet-être pas compte que de son héritage…

Éclaireur ? C’est comme quand vous partez faire des missions à plusieurs ? C’est un vrai poste dans un clan ? demanda-t-il.

C’était peut-être là sa chance, pas besoin de se battre ou de chasser. Bon, il verrait moins ses parents, mais il serait pas non plus seul, si ?

« Éclaireur ? C’est comme quand vous partez faire des missions à plusieurs ? C’est un vrai poste dans un clan ? » Demanda l'enfant, crédule. Mu'Awiya grimaça, un instant. Il avait bien eut l'idée de scinder les siens en plusieurs catégories... Mais seule Kosa avait suivit le mouvement. Il n'avait tout de même pas abandonner l'idée, mais il avait compris qu'il serait trop risquer de faire cela maintenant.

« Dans un vrai clan, oui. Pour l'instant nous ne pouvons pas nous le permettre mais... Un jour, un jour. »
Il sourit à l'enfant, posant ses yeux orangés sur lui. « A la vérité, l'éclaireur n'explore pas une fois le clan sédentarisé. Il s'occupe surtout de s'avancer hors du territoire pour guetter les menaces. »