Fausse joie

Privé Lengo

THE NAIVE KID

Mu'Awiya semblait être sauvé, du moins Kosa et Heka étaient arrivé avec le sacro-saint remède et rien n'aurait pu contrecarrer les plans de Naifu plus que cette terrible nouvelle. Les médicaments avaient été administré la veille et à chaque minute le rouquin espérait qu'ils aient l'effet inverse que celui escompté et que ce remède à point nommé finisse par condamner le Tyran à la mort qu'il méritait. Le Rougeois avait joué avec le feu car il y était habitué et se pensait déjà sauvé d'affaire mais forcé de constater qu'il avait été pris à son propre jeu, Naifu se faufilait comme la fouine innocente qu'il était entre les membres du clans cherchant la sympathie de ces derniers. Il n'était qu'un petit adolescent frêle après tout.
À force de vouloir se soustraire au regard de feu de Mu'Awiya, Naifu avait totalement perdu de vu son propre chemin et avait fini par rencontrer le poitrail de Lengo. Le choc n'avait pas été violent mais plutôt surprenant: Lorsque l'on ne s'attendait pas à trouver sur son chemin le grand mâle brun il y avait de quoi sursauter. Le rouquin s'était presque recroquevillé, désolé d'avoir dérangé de la sorte ce haut personnage des Msafara.

- Oh, sire Lengo, Remarquait-il; Je suis désolé de vous être rentré dedans. Sa petite voix fluette portait à peine jusqu'aux oreilles de l'intéressé, elle ne ressemblait à rien de plus que les chuchotement d'une petite fille apeurée.

- J'avais la tête ailleurs et avec l'excitation de savoir notre bon sire Mu'Awiya sauvé je n'étais pas attentif! Avait-il besoin d'argumenter, de se justifier de son erreur.

Alors c'était donc vrai. Héka et Kosa avaient réussi à ramener un remède et ce dernier avait l'air de faire effet.

Cela faisait quelques jours que les deux femelles étaient rentrées et Mu'Awiya n'avait toujours pas daigné ne serait-ce que les remercier dignement, devant le groupe tout entier. En ce début de soirée, notre mâle aux crins lisses s'était éloigné du reste de ses camarades. Trop peu pour les perdre de vue mais bien assez pour que personne ne puisse l'entendre ruminer dans son coin, si tant est qu'il le faisait. Et ce n'était pas le cas. Du moins pas à voix haute. Il était discret, l'ex-conseiller ; silencieux comme la lande désormais épuisée de ses maigres vivres.

Lengo avait clos ses paupières. Il réfléchissait, il pensait à cette occasion rêvée qui risquait bientôt de lui échapper. Quand soudain, une tête à la une fourrure bouffie vint percuter son poitrail. Il redressa les épaules et la nuque puis regarda l'étrange personnage, perplexe : "Oh, le fils des nobles." s'étonna son esprit tandis qu'il arquait un sourcil. "Pauvre petit."

- Bonsoir, Naifu. avait-il à peine eu le temps de lâcher que le rouquin s'empressa de s'excuser. Et il enchaîna ensuite sur une justification qui fit grincer le vieux des dents.

- "Notre bon sire Mu'awiya", dis-tu ? Je me doute que tous ici le considère comme le meneur du groupe car il en porte effectivement le statut. Mais il n'a en aucun cas l'honneur de pouvoir porter un tel titre.

Lengo souffla des narines, serrant les crocs dans une grimace abjecte tandis que son dur regard se posait sur le concerné, nonchalamment allongé au loin. Puis ses yeux glissèrent à nouveau en direction de l'angélique adolescent. Sa petite voix et son empressement le trahissaient ; il semblait troublé par quelque chose. N'importe qui avec un minimum de jugeote l'aurait remarqué

...sauf peut-être un certain blondinet un peu naïf et bourru. Mais qui donc le connaissait, en ces lieux ? Pas Lengo en tout cas.

- Que cherches-tu à fuir, petit ?

Qu'ils étaient humble ces Msafara, pas comme les Rougeois, c'était certain: D'où venait Naifu tout le monde se serait senti honoré d'un tel titre et tout le monde -surtout- en aurait gratifié le porteur même lorsqu'il n'était pas présent pour au moins faire bonne figure. Ici c'était bien différent et c'était certainement la raison pour laquelle faisait autant tâche (l'une d'elle, tout du moins). Il fallait noter que Lengo ne s'était pas senti gêné de se voir attribuer un tel titre...

- Fuir? S'étonnait-il, les oreilles droites pour appuyer ses mots. J'ai simplement la tête ailleurs. Aucune raison de fuir. Puis le petit jeune réfléchissait.

- D'où je viens, tout chef digne de ce nom mérite qu'on le respecte. Les haines également. Affirmait-il. Sire Mu'Awiya est le digne chef des Msafara après tout... Continuait-il un sourire hissé sur ses fines lèvres. Il n'avait pas manqué la grimace de Lengo mais devait encore savoir si elle témoignait d'un mépris à l'égard du-dit chef avant de se dévoiler de trop.

- Enfin, je ne vous apprend rien. Vous êtes d'accord?

- Digne ? Cela m'étonnerait. Mu'Awiya a obtenu le rang de "chef" car nous autres survivants étions bien trop bouleversés par les dramatiques évènements qui ont dévasté nos douces terres… L'émotion se fit ressentir dans sa voix mais son air dégoûté reprit bien vite le dessus : Il n'a aucune légitimité. Il n'est pas digne de ce titre : son statut actuel n'est que l'une des nombreuses et consternantes conséquences de Umpungufu wa pamzi.

Il serra les crocs. Lengo était amer. Et cela se vit comme le nez au milieu de la figure car le brun ne ressentait strictement aucun besoin de le cacher.